Léa Bigot nous a ouvert les portes de son atelier marseillais. Rencontre avec une artiste pluridisciplinaire.
Quel a été ton parcours ?
Je suis née sur l’Île de la Réunion où j’ai vécu jusqu’à mes dix-sept ans avant de quitter ma famille et d’aller vivre à Paris. J’y suis restée pendant dix ans. J’ai poursuivi mes études puis j’ai travaillé dans le domaine du graphisme et de l’édition. C’est à ce moment que j’ai développé une passion pour l’Art et le Design du XXe siècle ainsi qu’une attirance grandissante pour le volume. C’est alors, en parallèle du graphisme, que j’ai formé le duo artistique Klima Intérieurs avec mon amie Sarah Espeute. Pendant 4 ans, nous avons exprimé ensemble notre vision de l’objet et de sa place dans la vie quotidienne et dans nos intérieurs. Et il y a deux ans, j’ai déménagé à Marseille, j’ai retrouvé le soleil, la mer et les falaises. Ce lien, retrouvé avec le monde sauvage, m’a donné l’impulsion qu’il me fallait pour que je me lance dans ma démarche personnelle et que je crée enfin en volume.
Comment as-tu développé ta fibre artistique? Quel a été le déclic ?
Je n’ai jamais eu de déclic, cela a toujours été évident. Dans ma famille tout le monde crée. Mon père est photographe et avait son laboratoire de développement dans la maison. Ma mère, institutrice, nous a fait expérimenter avec énormément de médiums différents : le collage, la peinture et le modelage ! Je me souviens d’un éléphant en faïence rouge que j’avais fait petite. Ma technique d’aujourd’hui est restée proche de celle que j’avais à l’époque.
Comment as-tu vécu les derniers confinements ? Dirais-tu que cela a eu un impact positif ou négatif dans ton processus créatif ?
Le premier confinement était assez difficile pour moi. Je me projette énormément dans l’avenir et je me suis sentie enfermée. Pourtant, c’est à l’issue de ce confinement que j’ai trouvé ma technique de prédilection pour sculpter. Je pense qu’inconsciemment le fait de mettre en pause le défilement de la vie m’a permis de voir plus clairement le chemin à emprunter.
Qu'est-ce que la marque Sessùn t'inspire ?
Un univers marin et ensoleillé, brut, naturel et en mouvement.
Quel est le livre qui t’as le plus marqué et/ou inspiré ?
Dernièrement, je dirais que c’est L’amant de Marguerite Duras. J’ai beaucoup aimé ce livre qui, au travers d’une histoire d’amour, dépeint la société coloniale de l’époque. Cette société, marquée par la brutalité et l’injustice, a été celle de mes arrières grands-parents. Ce sont des vies qui ne sont pas documentées dans l’histoire, et peu racontées par les familles, qui pourtant transpirent au travers des nouvelles générations qui peuplent les départements d’outre-mer.
As-tu un rituel qui rythme ton processus de création à l’atelier ?
La sieste. Mon processus de travail est un constant dialogue entre mon esprit et mon corps. Le sommeil est un sas de transition nécessaire à mon basculement entre deux états : l’état de réflexion, un moment où je cherche à me replonger dans ma réception des éléments extérieurs, et le moment de la sculpture, un moment très physique.
Parle-nous de la pièce que tu as imaginée pour la carte blanche « Floraison Créative » de Sessùn.
Magda est imaginée comme une tour qui grandit d'elle-même vers la lumière. De par sa nature composite — trois modules qui s'emboîtent de façon organique — elle rappelle une ossature articulée verticalement qui s’élance vers le haut. Un hommage au soleil et à tous les êtres qui vivent en cherchant à se rapprocher de lui.
Que retiens-tu de cette expérience de carte blanche ?
Une certaine sérénité dans le travail. Celle que prodigue la confiance placée en mon travail par Sessùn et le respect de mon temps de réflexion. C’est une opportunité rare de pouvoir s’exprimer en toute liberté et d’être accueillie avec autant de bienveillance.
Un grand merci à Léa Bigot pour ce précieux temps au sein de l'atelier et espace collaboratif Coco Velten !
Crédits photos : Florian Touzet
Réalisations céramiques : Léa Bigot
Patrons en feutre : Azur World